Pépite intemporelle n°82: Raid The Radio de General Elektriks (2009)

La semaine dernière, General Elektriks  sortait son septième album déjà Party Like a Human. JeGeneral Elektriks dois reconnaître que ces dernières années j’ai perdu d’oreille Hervé Salters et j’ai clairement quelques albums de retard… Je compte bien rapidement me remettre à jour car j’ai pris plaisir à suivre le début de carrière de General Elektriks. Le deuxième opus Good City for Dreamers en 2009 fonctionne ainsi pour moi comme une véritable madeleine de Proust. Un funk ultra moderne et jouissif, une énergie débordante à l’image de ces pas de danse si caractéristiques d’Hervé derrière les synthés, un concert enthousiasmant à l’Astrolabe et une belle ribambelle de bombinettes croisant avec hédonisme le funk et l’électro-pop. J’aurais pu choisir le groove nocturne de Little Lady ou encore les rythmes enivrants de Take back The Instant qui n’est pas sans rappeler l’univers de Just Jack mais ce soir j’ai envie de l’instantanéité de Raid The Radio. Rythmique funk, sifflements obsédants, puissance pop incontestable, clip loufoque, tout est présent pour incruster un sourire béat sur votre visage. Allez, je vous laisse en de bonnes mains, j’ai du General Elektriks à écouter, enjoy !

Sylphe

Pépite du moment n°90: U&ME d’alt-J (2021)

L’annonce d’un futur d’album d’alt-J a toujours le mérite d’illuminer ma journée, d’autant plusalt-J quand elle est accompagnée d’un single plein de belles promesses. Pour celles et ceux qui n’ont pas encore eu la chance de croiser la voix si caractéristique de Joe Newman et l’univers des Anglais entre indie-pop et folktronica, tout a commencé en 2012 avec le coup de maître initial An Awesome Wave qui s’est incrusté avec brio dans mon ADN musical. Cette brillante voix nasillarde, la maîtrise des harmonies vocales, les rythmiques alambiquées quelquefois aux confins du hip-hop, des titres brillants (le quatuor TessellateBreezeblocksSomething GoodMatilda), la recette est imparable. En 2014, This Is All Yours reste dans la même veine même si moins de titres sortent véritablement du lot, à part Nara. Le troisième opus Relaxer en 2017 approfondit l’influence électronique, enrichie par une version hip-hop de ce dernier un an après, Reduxer. Un album qui mériterait que je me penche davantage dessus… Le quatrième album intitulé The Dream est donc attendu pour le 11 février 2022, le titre U&ME vient tout juste de sortir en éclaireur. On se retrouve dans l’ambiance de An Awesome Wave avec la voix de Joe Newman mise en avant sur une rythmique lancinante, avec une guitare aux accents presque psychédéliques. Le tout est illustré par un clip mystérieux qui est l’oeuvre de Prosper Unger-Hamilton, le frère du bassiste du groupe. La journée passée au skate-park est parcourue d’événements fantastiques qui donnent un aspect assez irréel à l’ensemble. Voilà de quoi nous faire patienter, enjoy!

 

Sylphe

Five reasons n°31 : Prose combat (1994) de MC Solaar

prosecombatJuillet 2021 et l’été avaient vu la réédition très attendue de Qui sème le vent récolte le tempo (1991), premier album de MC Solaar. Septembre 2021 et l’automne sont désormais le temps de Prose combat, deuxième album du même MC Solaar. Rappelons que, pour de maudites histoires de droits entre l’artiste et sa maison de disque, ces deux opus étaient indisponibles à la vente ou l’écoute en streaming depuis 20 longues années. La situation s’étant décantée, on a pu profiter voici quelques mois de la réédition de Qui sème le vent, notamment en support vinyle de belle facture sonore. Aujourd’hui (ou plutôt demain 24 septembre chez tous les bons disquaires) Prose combat suit le même chemin. L’occasion de retrouver cet album majeur du rap français, et disons même de la musique tout simplement. Explications en 5 raisons chrono.

  1. Prose combat enfonce le clou du premier album, et sera tout simplement l’album de la consécration pour MC Solaar. Qui sème le vent récolte le tempo est un primo-album avec ce que cela comporte de fraîcheur, de naïveté et de spontanéité. Album pourtant très maîtrisé qui joue sur le mix hip-hop/acid jazz, il est à mon goût largement surpassé par la puissance de Prose combat. Comme si Solaar avait laissé fermenter pendant 3 ans sa galette séminale pour laisser exploser son talent d’écriture, son flow, et sa complicité avec Jimmy Jay, Boom Bass et Zdar.
  2. Prose combat se pose comme un album plus mature, mais aussi plus sombre, tant dans ses compositions que dans les textes et thématiques. Il suffit d’écouter La concubine de l’hémoglobine, Dieu ait son âme ou La fin justifie les moyens pour prendre conscience de la profondeur et, bien souvent, de l’actualité des mots de Solaar. Rien que le titre de l’album annonce la couleur. Des mots qui percutent, du texte qui bataille et porte des messages. La mort, la religion, le sens de la vie, le temps qui passe, la célébrité : il y a tout ça, et bien plus, dans Prose combat.
  3. La puissance de cet album est en effet dans le savant mélange entre ces moments plus graves et d’autres plus légers qui explosent de toute leur lumière. Tout le talent de Solaar est de ne pas juxtaposer titres lumineux et titres plus dark, mais de mélanger tout cela au fil des 55 minutes de son. Obsolète, sous des airs de ritournelle humoristique, cache des questionnements sur les rapports humaines. L’NMIACCd’HTCK72KPDP (à lire à haute voix) regroupe du beau monde comme Ménélik, Soon-e mc et les Sages poètes de la rue pour un titre collectif et festif.
  4. Musicalement, Prose combat est une folie de tous les instants. Les samples, boucles, scratches et autres ingrédients hip-hop sont ici maniés avec un brio rarement retrouvé depuis, que ce soit chez Solaar ou dans le rap français en général. Un exemple ? A dix de mes disciples, une sorte de furieux titre sans aucune respiration, construit comme une avalanche de sons portés par une ligne de basse entêtante. Et, puisqu’on parle de samples sur Prose combat
  5. … comment ne pas parler de Nouveau western et de son sample hypnotique ? C’est presque tarte à la crème, tant ce morceau a été entendu et ré-entendu, tant il a fonctionné et marqué nos oreilles. Pourtant, renversons le propos : si Nouveau western est aussi marquant, c’est lié à sa perfection. Et à son sample d’ouverture, qui reprend l’intro de Bonnie & Clyde de Gainsbourg. Ecoutez bien : parfois le sample originel s’efface, pour mieux réapparaître en claquant dans l’air, en lien avec un texte parfait. Chaque mot percute, chaque ligne est une référence (voire plusieurs). L’ensemble compose un titre intemporel qui, à lui seul, justifie Prose combat.

Vous ne pouvez pas aimer le hip-hop et vous passer de Prose combat. Vous ne pouvez pas aimer la chanson française et faire l’impasse sur Prose combat. Vous ne pouvez pas aimer la musique et zapper Prose combat. Prose combat est incontournable et se doit d’être dans votre discothèque. Et comme la réédition vinyle est excellente, filez claquer 25 et quelques balles dès demain. Incontournable et magistral.

Même le clip de Nouveau western est une folie absolue

Raf Against The Machine

Review n°85: Kerber de Yann Tiersen (2021)

Deux ans après Portrait, subtil best-of de titres arrangés avec finesse, Yann Tiersen nous revient avec unTiersen Kerber nouvel album Kerber. Je ne vous ferai pas l’injure de vous présenter de nouveau cet artiste qui, depuis plus de 25 ans, nous offre sa sensibilité et son talent. Depuis qu’il s’est installé à Ouessant et qu’il a mis en place son studio de l’Eskal, ce dernier propose une musique encore plus intimiste que j’avais trouvée riche en émotions dans EUSA en 2016 mais un peu trop dépouillée dans ALL en 2019. L’objectif est assez simple: rendre hommage à son nouveau havre de paix qu’est Ouessant et faire de son piano le discret messager. Cet album composé de 7 titres reprenant des noms de lieux à Ouessant fait évoluer sa recette, en partie grâce à la patte du producteur Gareth Jones. Affirmant lui-même que le piano ne suffisait plus à ses aspirations, Yann Tiersen a choisi de renouer avec une musique électronique qui a toujours parcouru en filigrane son oeuvre, voire plus explicitement dans l’excellent Dust Lane en 2011 « Quand j’ai recommencé à travailler il y avait ce projet d’album centré sur le piano. Donc je me suis mis au piano et en fait, ça me faisait super chier (rires) ! Alors je me suis dit que le piano serait un prétexte pour traiter les sons et faire un album de musique électronique« .

Le résultat est à la hauteur du talent du Breton qui propose 7 instantanés de Ouessant, valant tous les spots touristiques possibles. Le brouillard parsemé de touches de piano lumineuses de Kerlann et les sonorités plus aquatiques d’une grande douceur d’Ar Maner Kozh ouvrent de manière assez classique l’album et invitent à un vrai voyage impressionniste. Kerdrall apporte un supplément d’âme à travers le contraste d’un piano tiraillé entre fragilité et élan primesautier d’un côté et ces grésillements de l’autre, la voix en fond de sa compagne Tiny Feet (alias Emilie Quinquis) tentant sur la fin de nous ramener vainement sur terre.

Après un Ker Yegu dans la droite lignée de Kerdrall, je suis sous le charme de Ker al Loch qui abandonne peu à peu sa douce mélancolie pour aborder des terres électro plus abruptes. Le résultat est incisif et plein de caractère, le spectre de Kraftwerk n’est pas loin, comblant à mon goût les manques d’ALL. Le titre éponyme Kerber et ses 10 minutes intenses donne finalement ses lettres de noblesse à ce très bel opus, résumant à merveille toutes les aspirations d’un Yann Tiersen que je prends toujours plaisir à suivre les yeux fermés et les autres sens profondément décuplés, enjoy!

 

Sylphe

Pépite du moment n°89: Fear Colours de LoneLady (2021)

Des nouvelles aujourd’hui de Julie Campbell, alias LoneLady, artiste anglaise signée sur le très pointu label LoneLadyWarp. Depuis son premier album Nerve Up en 2010, je suis séduit par cette électro froide et méthodique qui s’est construite sur les cendres du post-punk. Fin juin, son troisième album seulement Former Things est sorti (après Hinterland en 2015) et a accompagné mon été. Un album dense de 40 minutes pour 8 titres qui incitent de plus en plus à bouger sur les dance-floors, avec des sons plus catchy à la Metronomy qui se marient à merveille avec l’influence évidente de New Order. Ne vous attendez cependant pas à une totale métamorphose, à l’image de sa pochette sombre et énigmatique l’ensemble reste sombre et minéral. Pour illustrer cet album qui mérite amplement d’être écouté pour accompagner vos soirées automnales, j’ai choisi le titre Fear Colours qui m’obsède par sa boucle hypnotique et ses choeurs indus. Par son dépouillement et son âpreté, il dépeint avec un certain brio les couleurs de la peur…. Enjoy!

Sylphe

Pépite du moment n°88 : Daytime coma (2021) de Archive

Ce 15 septembre 2021 marque le retour aux affaires du groupe britannique Archive. On savait la formation au travail sur un douzième album studio depuis quelques mois. Après une période de célébration de 25 années d’existence au travers d’un dantesque coffret 25, d’une non moins dantesque tournée et d’un album de relectures Versions puis de remix de ces relectures, la bande à Danny Griffiths et Darius Keeler annonçait en mai dernier l’ouverture des précommandes de #Archive12 (titre de travail non définitif), à paraître en avril 2022. Promis sous la forme d’un double CD ou triple LP, autant dire que le bon iencli que je suis est turbo chaud à l’idée de retrouver toute cette fine et brillante équipe et a déjà commandé la triple galette (sans saucisse).

Ce que l’on ne savait pas, c’est qu’un premier single du nouvel opus serait disponible dès cette rentrée. Surprise du jour, et bonne surprise, Daytime coma est disponible depuis aujourd’hui à l’écoute sur toutes les bonnes plateformes de streaming. Que raconte ce coma diurne ? Plein de choses, et bien plus encore. D’une durée de plus de 14 minutes, Daytime coma renoue avec les grands titres du groupe comme Lights, Again, Controlling crowds ou encore Axiom. Le titre est articulé en quatre temps bien divers, et débute pendant près de 6 minutes par une intro planante piano-voix augmentée de synthés, avant de basculer dans de l’électro plus rythmée et marquée. La batterie se mélange à des samples vocaux fantomatiques pour créer une sorte de vertige. Vers la 9e minute, tout se suspend pour laisser la place à des boucles de voix déformées, au cœur d’un long passage planant et presque inquiétant de voix enrobées de nappes de synthés. Puis, les dernières minutes renouent avec l’électro qui tape, pour un final apocalyptique et épique. Daytime coma atteint alors son paroxysme musical, truffé de voix torturées, pour nous laisser KO.

Si la musique convoque une grosse somme d’émotions, le texte, relativement court mais répété, raconte l’enfermement, la suffocation, l’étouffement, l’atonie, mais aussi la lumière et la sortie de ce coma diurne. Impossible de dissocier ces 14 minutes des mois covidesques que l’on vient de traverser, et dont on n’est pas tout à fait sortis. Le sujet n’est pas tout à fait le même et bien plus vaste, mais la poésie, musicale comme textuelle, joue pleinement son rôle. Daytime coma est une claque totale, un titre qu’on n’attendait pas, ni à cette date, ni aussi puissant. D’une certaine façon, le groupe semble avoir condensé en un single de 14 minutes un aperçu de ce qu’il sait faire à ce jour et de ce que l’on risque de retrouver sur #Archive12. On ne pouvait pas rêver meilleur teaser, même si l’attente d’ici avril 2022 va être longue. Le plus grand groupe du monde est de retour, et vous n’êtes pas prêts. Daytime coma de Archive, c’est maintenant. Sans aucune réserve.

Raf Against The Machine

Review n°84: Loving In Stereo de Jungle (2021)

Il faut bien se rendre à l’évidence, on est repartis pour un tour et les vacances ensoleillées sont derrière nous. Jungle Loving In StereoLoin de moi l’envie de m’apitoyer mais plutôt le désir de prolonger les sensations estivales avec un album qui a illuminé ma deuxième quinzaine d’août. Depuis son premier album éponyme sorti en 2014, le duo britannique Jungle composé de Tom McFarland et Josh Lloyd-Watson propose un son groovy mêlant aspirations dance et sonorités disco. On a pris plaisir dernièrement à réécouter cette discographie et savourer des titres comme Busy Earnin’ (voir ici) mais il est temps de voir, trois ans après l’album For Ever, ce que vaut vraiment ce troisième opus Loving In Stereo, signé sur leur propre label et non sur l’armada XL Recordings.

On peut d’emblée affirmer que Jungle n’a pas pris de risques démesurés -je ne doute pas que certains diront que le résultat est somme toute assez, voire trop attendu – et décline avec justesse une formule qui a déjà parfaitement fait ses preuves. Certes, le titre Romeo vient explorer les contrées du hip-hop avec le flow percutant de Bas ou Goodbye My Love s’appuie sur la douceur du chant de Priya Ragu pour une pop-folk surprenante mais l’ensemble ne révèle pas une envie de se renouveler fondamentalement. Nous retrouvons ainsi les recettes habituelles du succès de Jungle. Tout d’abord, je prends plaisir à retrouver ce son taillé pour les dance-floors avec des rythmiques uptempo, des sonorités disco à foison, des cordes qui viennent embellir l’ensemble. Je n’arrive pas à m’ôter de l’esprit l’image de The Shoes à l’écoute de certains titres et c’est plus qu’un compliment dans ma bouche. Le titre Keep Moving est ainsi la pépite électro-pop ultime de l’album qui m’obsède depuis presque un mois. Une basse jouissive, des explosions qui viennent contrebalancer des instants où le temps semble comme suspendu, ces cordes subtiles, le résultat est imparable et sublimé par le clip, prenant rendez-vous avec le top des titres 2021. Si vous aimez ce son immédiat, All Of The Time, Talk About It ou encore Truth devraient vous apporter aisément cette dose de dopamine qui boostera votre rentrée.

La deuxième principale tendance de ce Loving In Stereo c’est la tentation d’une électro-pop lumineuse qui se veut plus rêveuse à travers le duo Lifting You/ Bonnie Hill. Un brin lisse, cette dernière est sublimée quand la basse groovy digne de Balthazar entre en jeu, une basse qui a véritablement pris le pouvoir sur l’album. Le tube électro Fire ouvre un champ de possibilités infinies alors que No Rules suinte par tous les pores un esprit rock plus poisseux.

Vous l’aurez bien compris, ce Loving In Stereo fonctionne parfaitement et apporte son lot de moments forts. Il faut reconnaître qu’une petite voix intérieure est demandeuse d’innovations plus importantes mais celle-ci s’incline face à la puissance des tubes, enjoy!

Sylphe

Son estival du jour n°52 : Le carnaval (2009) de Da Silva

Un dernier son estival avant de reprendre le fil d’une saison 2021-2022 faite de reviews, pépites et autres réjouissances. Avec le son estival n°51 voici deux jours, on mourrait en chantant avec Shaka Ponk. Et avec classe. Pourtant, on peut aussi se jeter chaque matin dans un joyeux bordel carnavalesque. Bienvenue dans Le Carnaval de Da Silva, tiré de son troisième album La tendresse des fous. Bienvenue dans le merdier festif qu’est le combat ordinaire et quotidien de la vie. Bienvenue au monde. Bienvenue sur Five-Minutes.

Raf Against The Machine

Son estival du jour n°50 : When the music’s over (1967) de The Doors

Sortie en 1967 sur Strange days, deuxième album studio du groupe américain The Doors, When the music’s over clôt la galette de ses quasi 11 minutes hallucinées et hallucinantes. Tout comme The End fermait, quelques moins plus tôt, le premier opus de la bande à Jim Morrison. Que dire de plus qui n’ait déjà été dit à propos de When the music’s over ? Titre écorché, épique, furieux, viscéral… on y suit Morrison en plein trip poétique, accompagné des claviers entêtants de Manzarek et de la guitare torturée de Krieger. Tout ce beau monde soutenu par la finesse de Densmore à la batterie. « When the music’s over / Turn out the lights » : Quand la musique s’achève / Eteignez les lumières. Mais, surtout, remettez de la musique. Pour rester en vie.

Raf Against The Machine