Pépite du moment n°120: Our Flag d’Ibrahim Maalouf feat. Sharon Stone (2022)

Mieux vaut parler succinctement de musique que de proposer un silence pesant, tel sera mon objectif du soir. Voilà uneIbrahim Maalouf - Capacity to Love bonne semaine que j’écoute le dernier album Capacity to Love d’Ibrahim Maalouf. Un album qui m’a désarçonné sur les premières écoutes par son hétérogénéité mais que je savoure de plus en plus au fil des écoutes car il s’impose pour moi comme un mix gargantuesque, véritable déclaration d’amour à la musique sous tous ses aspects. L’album s’appuie sur une collection d’artistes prestigieux, d’Erick The Architect à Gregory Porter en passant par M ou De La soul, un vrai feu d’artifice sonore qui part dans tous les sens et fait feu de tout bois. Avec bien sûr comme dénominateur commun et liant magique cette trompette d’Ibrahim Maalouf que je ne vous ferai pas l’injure de présenter…

J’ai choisi l’avant-dernier titre de l’album Our Flag qui met à l’honneur un texte engagé écrit et récité par Sharon Stone sur un fond sonore superbe de douceur et de mélancolie qui m’a rappelé par certains côtés les BO d’Hans Zimmer. Les explosions de cuivres laissent la place à ce superbe texte dont les mots frappent avec poésie et précision, comme une gifle assénée à des dirigeants qui ont perdu le sens des priorités. Un bijou de texte engagé, enjoy !

 

Sylphe

Pépite du moment n°119 : Delighted (2022) de Benjamin Clementine

Benjamin-Clementine-And-I-Have-Been-1392x1392-1A quasiment un mois de la sortie de son nouvel album And I have been, prévu pour le 28 octobre prochain, Benjamin Clementine nous gratifie d’un nouveau single. Sobrement intitulé Delighted, ce second extrait laisse espérer un nouvel opus toujours aussi brillant. Nous avions déjà eu un aperçu de And I have been avec Genesis. Ce prochain et troisième album devrait jouer, comme toujours avec Benjamin Clementine, sur le terrain de l’émotion et de la sensibilité à fleur de peau. Portées par la voix à la fois puissante et bouleversante du garçon, les chansons ont toujours apporté leur petite claque émotionnelle. Tout avait commencé en 2015 avec Cornerstone, une ballade d’écorché vif qui avait instantanément filé les poils à qui voulait bien s’y pencher. Un de mes titres préférés, tout artiste/album confondu.

Avec Delighted, Benjamin Clementine pose de nouveau une mélodie vocale saisissante, cette fois sur des cordes sobres mais intenses. C’est la même puissance que Cornerstone, mais sur la durée. A l’époque, la grande question était de savoir si tout cela allait durer, ou ne serait qu’un feu de paille. Cette dernière hypothèse est rapidement balayée, tant Delighted vient chatouiller plusieurs de mes cordes sensibles. Tout en prenant de l’ampleur à la deuxième minute avec l’ajout de chœurs et d’une légère section rythmique, avant de retomber dans une épure quasi mystique. Un grand morceau, qui se paye le luxe d’un clip magnifique, tourné dans un noir et blanc méchamment maîtrisé.

Delighted offre ainsi une seconde facette de l’album à venir. Genesis était plus enrobé dans ses arrangements, plus doux à l’écoute d’une certaine façon, mais tout aussi pénétrant. Ce second extrait vient équilibrer l’aperçu, nous hypant un peu plus dans l’attente de And I have been. On écoute sans plus tarder Delighted et, un plaisir n’arrivant jamais seul, on se remet aussi dans les oreilles Genesis. And I have been, le nouveau Benjamin Clementine, c’est J-26.

Raf Against The Machine

Pépite du moment n°118: The Last One de Daniel Rossen (2022)

Si vous avez envie de douceur ce matin, j’ai ce qu’il vous faut avec de la folk soyeuse à souhait.Daniel Rossen - You Belong There Vous connaissez probablement de nom Daniel Rossen qui est un des chanteurs principaux de Grizzly Bear, groupe de folk originaire de Brooklyn qui a sorti 5 très beaux albums (avec une mention spéciale pour Veckatimest en 2009 et Shields en 2012). Sur les dix dernières années, les Américains ont seulement sorti Painted Ruins en 2017 et ce n’est pas une surprise de voir Daniel Rossen se lancer dans un projet solo. Le 8 avril dernier est donc sorti You Belong There, qui sonne de manière évidente comme du Grizzly Bear et confirme le talent de songwriting incontestable de son leader vocal. Le titre du jour The Last One, avant-dernier morceau de l’album, s’appuie sur une guitare sèche digne de Ray Lamontagne et une batterie qui gagne en intensité tout au long. L’amour est abordé avec pudeur, à l’image de la voix de Daniel Rossen toujours dans la retenue et la justesse. Un titre à savourer au coin de la cheminée, tout en pensant à faire des économies énergétiques… enjoy !

 

Sylphe

Pépite du moment n°117 : This Fffire (2004) de Franz Ferdinand

Franz_Ferdinand_album_cover.svgLes plus attentifs d’entre vous auront d’emblée remarqué une incohérence dans le titre de cette chronique. Comment un morceau de 2004 peut-il être pépite du moment ? En effet, nous sommes toujours bien calés en 2022, entre une pandémie covidesque qui ramène sa fraise pour la huitième édition, un conflit mondial larvé qui n’attend qu’une étincelle pour éclater et une crise économique résultant, entre autres, de la combinaison des deux événements précédents. Tout cela étant le contexte idéal pour voir proliférer théories conspirationnistes, intolérances en tout genre et connerie humaine de la pire espèce. On est pas bien là ? Paisibles ? Bref, je m’égare sur cette année 2022, mais ferait-il meilleur vivre en 2077 ? Je vous vois, le regard perplexe et inquiet. Avec l’impression que j’ai totalement basculé dans une dimension parallèle où 2004, 2022 et 2077 ne sont plus qu’un seule et même année. Pas du tout, mais la pépite musicale de cette chronique nous plonge dans ces trois années. Explication.

En cette année 2022, et très précisément depuis le 13 septembre dernier, Netflix propose dans ses programmes Cyberpunk Edgerunners, série animée américano-japonaise de dix épisodes. L’histoire se passe en 2077, dans cette bonne ville de Night City bien connue des rôlistes et des gamers. Night City, c’est la mégalopole futuriste imaginée comme terrain de jeu dans Cyberpunk 2077, jeu vidéo sorti fin 2020, lui-même inspiré du jeu de rôle sur table Cyberpunk 2020 créé par Mike Pondsmith. Vous comprenez le merdier des dates ? On ne va pas y aller par quatre chemins : Cyberpunk Edgerunners est une vraie réussite. La série reprend les codes visuels du jeu vidéo, avec de nouveaux personnages. L’ambiance crade, criminelle, sexuelle et cyberconnectée de Night City est parfaitement retranscrite. Les scènes d’ultra-violences alternent avec d’autres plus posées qui laissent entrevoir le putain de cauchemar cyberpunk de l’année 2077.

Quid de 2004 dans tout ça ? Le générique de la série Cyberpunk Edgerunners. Si la BO efficace est composée de divers titres, dont certains déjà entendus dans le jeu Cyberpunk 2077, le générique va piocher dans du bon rock qu’on aime, avec This Fffire de Franz Ferdinand. Sorti en 2004 (nous y voilà) sur le premier album du groupe, le morceau contient déjà tout le talent de la team Alex Kapranos. Mieux encore, il colle parfaitement à l’ambiance de Cyberpunk Edgerunners. A la base, je n’aurais jamais fait cette association. A l’entendre, c’est d’une évidence et d’une pertinence absolue. On s’écoute donc le This Fffire original, accompagné ensuite de quelques friandises Cyberpunkiennes. Histoire de vous donner envie de plonger dans cet univers de malade, et dans un jeu fascinant en dépit du scandale technique qu’il a représenté à sa sortie.

Raf Against The Machine

Pépite du moment n°116: King of Sea de Kwoon feat.Babet (2022)

Des nouvelles de Sandy Lavallart, alias Kwoon aujourd’hui ! On l’avait laissé il y a deux ans avec un très beau single Life (à relire et réécouter par ici) et une interview éclairante (à relire par ici). Pour ce nouveau single King Of Sea, Kwoon s’est entouré de deux membres de Dionysos, Babet et Stephan Bertholio ainsi que du réalisateur de clip Stéphane Berla. Le titre a pour sujet principal le phare breton de Tévennec, phare hanté qui serait à l’origine de multiples naufrages. Sublimé par un clip magnifique empreint d’une belle poésie, King of Sea nous enveloppe de sa douce mélancolie et confirme la puissance émotive du chant de Sandy Lavallart. La voix de Babet accompagne avec délices la montée émotionnelle qui fait briller les yeux. C’est beau, c’est intemporel, ça réveille le spectre de Sigur Ros en fond, il n’y a pas mieux pour illuminer ton dimanche, enjoy !

 

Sylphe

Pépite du moment n°115: We Are Your Future de MLD (2022)

Il s’appelle Stéphane Mourgues et officie sous le nom de MLD, il sort son deuxième EP We Are le 24 juin prochain après un premier EP Futur sorti en mars 2021. Je ne connaissais absolument pas cet artiste mais son single We Are Your Future paraît d’une telle évidence que j’aurais été bien égoïste de le garder pour moi. Magnifié par un superbe clip et une galerie d’enfants/jeunes adultes issus du monde entier, MLD nous propose un hymne électro imparable qui nous ramène à la fin des années 90 quand The Chemical Brothers retournait les foules. Le titre fortement inspiré par l’acid techno associe la puissance des beats à une voix robotisée un brin inquiétante, contrebalancée par des synthés plus aériens. Le titre beaucoup plus riche qu’il ne peut le paraître à la première écoute donne l’impression que Thylacine a fait une incursion bien sentie dans les sonorités plus âpres de l’acid techno. Voilà en tout cas le titre qui m’obsède depuis quelques jours, enjoy !

 

 

Sylphe

Pépite du moment n°114: En famille de Florent Marchet (2022)

Il serait définitivement temps que je m’intéresse à la discographie de Florent Marchet… QueFlorent Marchet Garden Party j’aille me confronter à ses nombreuses musiques de films, que je réécoute ses albums (Rio Baril en 2007 et le dernier Bambi Galaxy en 2014 me viennent immédiatement en tête) ou que je lise son premier roman Le monde du vivant publié en 2020. Florent Marchet sortira son sixième album solo Garden Party le 10 juin prochain et, depuis quelques jours, je suis obsédé par un des titres qui en est extrait Paris-Nice… Ce titre sublime qui n’a qu’un lien bien secondaire avec la course cycliste est touchant d’humanité mais malheureusement je n’ai pas trouvé de vidéo de ce titre pour illustrer l’article – mon petit doigt me dit que ce ne sera que partie remise et que je risque bien de vous parler courant juin de Garden Party.

En fouinant, je me rends compte que plusieurs titres sont déjà sortis dont le dernier En famille le 12 mai et de nouveau, dès la première écoute, c’est bingo ! La voix feutrée de Florent Marchet et l’instrumentation subtile entre les claviers et la montée finale tout en cuivres permettent de parfaitement mettre en valeur la justesse et la pudeur des paroles qui traitent d’un sujet pourtant amplement rebattu : la famille. Florent Marchet traite de ces sempiternelles réunions de famille et souligne toute la complexité de la famille, à la fois nécessaire et constructrice de l’identité, mais aussi obstacle à l’émergence du vrai moi et source de frustrations fondamentales. Ce titre est un joli clin d’œil à la pièce de théâtre que j’étudie actuellement, Juste la fin du monde de Lagarce (pièce brillamment adaptée au cinéma par Xavier Dolan en 2014), qui révèle toute la difficulté de communiquer avec ses proches. Je ne peux que vous inviter à savourer ce En famille qui me donne une farouche envie d’écouter Garden Party, enjoy !

 

Sylphe

Pépite du moment n°113: Reclaim Your Heart de Daniel Johns (2022)

Avant de vous parler de deux coups de coeurs récents -le premier album de Wet Leg et leDaniel Johns - FutureNever sixième opus d’Arcade Fire – je vais faire une excursion en terrain totalement inconnu pour moi avec ce titre de Daniel Johns tiré de son deuxième album solo, FutureNever. L’Australien s’est fait connaître à la fin des années 90 en tant que chanteur et guitariste du groupe de rock Silverchair (groupe dont je n’ai jamais croisé le chemin), depuis il a sorti son premier album solo Talk en 2015 et a collaboré avec Paul Mac (sous le nom de groupe The Dissociatives) sur deux albums. Désolé pour ce retour biographique mais je reconnais bien aimer connaître les origines musicales d’un artiste.

Ce FutureNever regorge de très beaux moments, en particulier dans sa deuxième partie riche en featurings féminins. Néanmoins, c’est bien le morceau d’ouverture Reclaim Your Heart qui me scotche littéralement à chaque écoute…Superbe voix grave qui t’enveloppe immédiatement par sa chaleur et sa propension à chercher les notes plus hautes à la manière d’Hayden Thorpe (le chanteur de Wild Beasts), violons soyeux en fond et explosion finale épique digne de Woodkid sublimée par un solo de guitare assez jouissif, en 4 minutes Daniel Johns me transperce le coeur à chaque fois. Juste savourer, enjoy !

 

Sylphe

Pépite du moment n°112 : May the funk be with you (2022) de Ezra Collective

artworks-utmkk3aTViij-0-t500x500Internet, les réseaux sociaux et Twitter peuvent être le déversoir d’une immonde bêtise et de moult stupidités. Néanmoins, si l’on prend le temps de trier et de bien chercher, c’est aussi l’endroit où l’on peut croiser des gens très bien, des personnes normalement constituées qui proposent des contenus au minimum intéressants, quand ils ne sont pas passionnants. Des lectures, des films, des jeux, ou encore des sons, dont celui d’aujourd’hui découvert au détour d’une passionnante discussion virtuelle. May the funk be with you est le dernier titre en date de Ezra Collective. Ce quintet londonien officie depuis maintenant quelques années dans le domaine du jazz, et se donne régulièrement en live (ils seront d’ailleurs au Hasard Ludique à Paris demain 25 mars, mais ne cherchez pas de place, c’est complet). Constitué autour de Femi Koleoso à la batterie, il regroupe TJ Koleoso à la basse, Joe Armon-Jones aux claviers, Ife Ogunjobi à la trompette et James Mollison au sax ténor. Un quintet tout ce qu’il y a de plus classique dans sa composition, mais qui a le bon goût de mélanger allègrement les genres. Loin de se cantonner à un jazz standard, Ezra Collective envoie une dose d’afro-beat, une louche de hip-hop, une pincée de soul et de musique latines et une cuillerée de funk pour des sons qui groovent et balancent bien comme il faut.

Ezra Collective brille ainsi sur ce que l’on appelle la nouvelle scène jazz britannique, mais il ne s’agit là que de mots et de tiroirs pour tenter de ranger et de classer les choses. Or, la musique n’est jamais plus belle que lorsqu’elle s’affranchit des catégories, dépasse les styles pour mieux les mixer et se réinventer, à l’instar de ce que peut proposer A State of Mind, formation très efficace dont on pourrait parler des heures. Le groupe de Femi Koleoso n’invente rien en soi, mais les ingrédients et influences sont subtilement dosés pour obtenir une musique qui fonctionne. En fin de compte, est-ce du jazz, du funk, de la soul ? J’avoue que je n’en ai vraiment rien à faire. Toute cela n’a aucune espèce d’importance, tant que j’ai dans les oreilles de la musique qui me fait de l’effet. Et ce May the funk be with you joue parfaitement son rôle sur moi. Doté d’un titre dont la référence StarWarsienne ne peut pas m’échapper, ce son fonctionne dès les premières secondes. Que le groupe soit bâti autour de sa section rythmique ne fait aucun doute, tant le groove est présent d’entrée de jeu, confirmé par l’arrivée trompette/sax à la 20e seconde. Exposition du thème, avant de passer au chorus de trompette, pour retomber sur le thème principal. Structure jazz pur jus, mais interprétation sincère et chaleureuse qui fonctionne toujours.

May the funk be with you est un savoureux bonbon jazzy qui se déguste sans réserve, et qui est une chouette porte d’entrée aux deux albums d’Ezra Collective Juan Pablo: The Philosopher (2017) et You can’t steal my joy (2019), que je découvre à peine mais que je vous conseille déjà fortement. May the funk be with you est le son smooth et sucré dont on a besoin par ces temps troubles et incertains. Entre un conflit mondial larvé, une planète au bord de l’asphyxie, et quelques autres joyeusetés sinistres, on peut se laisser complètement submerger et sombrer. On peut aussi chercher de la lumière, de l’énergie, du cœur, de l’apaisement et de la vie qui palpite. Suis-je en train de finir l’écriture de cette chronique au soleil en terrasse, avec un grand café fumant et une poignée de M&M’s ? Vous n’avez aucune preuve.

Rendons à César… Evidemment, un grand merci à toi avec qui j’ai discuté musique autour notamment d’Archive, Pink Floyd ou encore John Coltrane (trio de maîtres), et qui m’a fait découvrir Ezra Collective et quelques autres chouettes sons. Tu te reconnaitras aisément. Cette chronique est, de fait, un peu la tienne.

Raf Against The Machine

Pépite du moment n°111: The Lightning I, II d’Arcade Fire (2022)

Une année où est prévu un nouvel album d’Arcade Fire, à savoir WE qui sortira dans les bacs le 6Arcade Fire WE mai prochain, est forcément une belle année musicale. La troupe formée autour de Win Butler et Régine Chassagne trône au sommet de mon panthéon, même s’il faut reconnaître que le dernier album Everything Now (4 ans déjà) montrait quelques signes d’essoufflement… La formation canadienne semble être à un tournant de sa carrière, le frère Will Butler qui s’épanouit dans sa carrière solo (relire par ici la chronique de son sublime dernier album Generations) vient tout juste d’annoncer qu’il arrêtait l’aventure Arcade Fire. Ce premier extrait The Lightning I, II ne demande bien sûr qu’à être scruté à la loupe pour percevoir les grandes lignes de WE. Le morceau se compose de deux parties claires et distinctes : une entame pop assez posée où on retrouve avec plaisir la voix envoûtante de Will Butler qui, s’il semble se revisiter capillairement parlant, n’a rien perdu de sa superbe vocale et une deuxième partie enlevée où le souffle épique (au propre comme au figuré à la vue du clip) vient traverser avec brio le morceau. Plus qu’à attendre le 6 mai désormais, et ça va être long, enjoy !

 

Sylphe