Pépite du moment n°130 : No Reason (2023) de The Chemical Brothers

Capture d’écran 2023-03-18 à 12.16.43Trente et un ans déjà que The Chemical Brothers nous envoient du son qui fait du bien. Fondé en 1992 par Tom Rowlands et Ed Simon, le duo anglais de musique électronique affiche 9 albums au compteur entre 1995 et 2019, tous plus captivants les uns que les autres. Depuis No Geography, dernier LP en date, c’est l’attente. On a beau se passer et repasser ces 9 galettes, depuis Exit Planet Dust (1995) jusqu’aux dernières secondes de Catch me I’m falling, qui referme No Geography, il faut avouer qu’on est un peu en manque de The Chemical Brothers. On avait bien eu le single The darkness that you fear en 2021, qui semblait annoncer un nouvel album. Pourtant, pas de nouvelles depuis, jusqu’à maintenant. Les deux anciens étudiants en histoire (comme quoi, en plus d’être une passionnante filière d’études, l’histoire mène décidément à tout) livrent ces jours-ci No Reason, un nouveau single inattendu et diablement efficace.

No Reason condense en 4 minutes tout ce qu’on aime des Chemical Brothers. Une basse funk sert de base rythmique et métronomique à un savant mélange de techno et d’acid house. L’ensemble est saupoudré de rock et de samples vocaux issus de Courts of war, titre du répertoire du groupe de new wave Second layer, sorti en 1979. Gros melting pot d’influences me direz-vous ? Exactement, et comme pour tout mélange des genres musicaux, c’est toujours une prise de risques qui peut finir en morceau casse-gueule et désastreux qui ne fonctionne pas. Sauf que nous avons là un des groupes les plus talentueux dans ses compositions, surtout lorsqu’il s’agit de préparer le genre de salade composée qui nous fait reprendre cinq assiettes.

No Reason est ainsi un titre bourré d’énergie(s), comme ont pu l’être en leur temps Block Rockin’ Beats (1997), Hey Boy Hey Girl (1999), Galaxy bounce (2002), ou encore Galvanize (2005). Si vous avez besoin de votre dose de groove qui donne le pêchon pour ce samedi, et même l’entièreté de votre weekend, No Reason est fait pour vous. Si vous voulez juste un bon son qui nous rappelle combien The Chemical Brothers sont indispensables au paysage musical, No Reason est fait pour vous. Si vous aimez la musique et la vie, No Reason est fait pour vous. En bref, listen it.

Chronique préparée à l’aide de l’article paru chez Tsugi : https://www.tsugi.fr/the-chemical-brothers-devoilent-no-reason-apres-deux-ans-dabsence/

Visuel pochette tiré du clip de No Reason, réalisé par Adam Smith & Marcus Lyall : https://store.thechemicalbrothers.com/*/No-Reason-Vinyl/No-Reason-12/7RJL1ZVN000

Raf Against The Machine

Pépite intemporelle n°125 : Time (1973) de Pink Floyd

61R7gJadP7L._SL1368_Il est grand temps d’écrire ma chronique hebdomadaire, et si vous en avez lu le titre, vous voyez déjà la pirouette que je vais faire. Il est grand temps… et hop un titre avec le mot temps dedans, en anglais pour faire un peu stylé. It’s time ! Retour 50 ans en arrière, avec un ultra classique comme on n’en fait plus. Tout a déjà été dit et écrit sur Dark Side of the Moon de Pink Floyd. Paru le 1er mars 1973 aux Etats-Unis et le 23 mars 1973 (on reviendra sur cette date) au Royaume-Uni, ce huitième album studio est la concrétisation du son Pink Floyd en gestation depuis la galette studio de Ummagumma (1969), puis Atom Heart Mother sur l’album éponyme en 1970 et Echoes sur Meddle en 1971. Un rock progressif qui expérimente les sonorités, une production studio léchée et tirée au cordeau avec notamment un mixage quadriphonique, un concept sonore qui conduit à l’évasion totale. Les 43 minutes et 10 titres de l’album forment comme un seul et même morceau qui déroulerait ses différents mouvements. Figurant dans le top 25 des albums les plus vendus de tous les temps, Dark Side of the Moon est resté 736 semaines dans le classement des albums du Billboard, de 1973 à 1988. On pourrait aligner les chiffres à l’envi, le constat est bel et bien là. Au-delà des ventes, des chiffres de production, Pink Floyd publie en 1973 un album majeur de l’histoire de la musique, dont le succès et les qualités ne se sont jamais démentis depuis.

Difficile de scinder Dark Side of the Moon en titres séparés, tant l’unité et la cohérence musicales sont évidentes. On peut toutefois s’arrêter sur une composition plutôt qu’une autre, comme on préfèrerait dans les Quatre saisons de Vivaldi le Printemps à l’Eté, ou l’ouverture des Noces de Figaro chez Mozart au reste de l’œuvre. En quatrième position de Dark Side of the Moon se trouve Time. Le morceau s’ouvre sur de multiples sonneries d’horloge avant de dérouler une longue intro de près de 2 minutes 30. C’est ensuite un titre assez classiquement pop-rock qui s’installe, pour s’amenuiser petit à petit et nous amener vers le formidable The Great Gig in the Sky qui conclut la face A. Ceux qui connaissent l’album savent que les 5 titres de la face B seront encore plus impressionnants. Il n’y a rien à jeter dans Dark Side of the Moon. Pas une seconde de trop, pas un son inutile ou raté. Même si j’ai une infinie passion pour Animals (1977), je reconnais en Dark Side of the Moon un chef-d’œuvre qui me fascine à chaque fois. Ne serait-ce que pour Time, apparemment un anodin titre rock qui prend toute sa mesure au cœur de cet album de légende.

Album tellement légendaire que, à l’occasion de ses 50 ans, il ressort dans une édition Deluxe le 24 mars prochain (je vous avais dit qu’on reparlerait du presque 23 mars). Une réédition dantesque, une version remasterisée (une fois de plus) agrémentée de nombreux goodies collector et de moult supports. Vinyles, CD, DVD, blu-ray, tout y est pour (re)découvrir Dark Side of the Moon sous toutes ses formes et sous tous les angles. Merci Pink Floyd, et merci aussi le capitalisme : si le contenu du coffret est dantesque, son prix aussi. A 250 € la bête, même les plus passionnés y réfléchiront à deux fois.

En revanche, sort séparément (tout en étant inclus dans le coffret) le Live at Wembley Empire Pool enregistré en novembre 1974. Il ne s’agit pas du concert intégral donnant à entendre Echoes en live, ainsi que des pré-versions de Shine on your crazy diamond, Sheep et Dogs, mais du bloc Dark Side of the Moon. Entendez par là que, pour la première fois en vinyle et CD, on va pouvoir écouter la prestation intégrale de Pink Floyd ces soirs-là jouant Dark Side of the Moon en live, de la première à la dernière note. Sensiblement ce que le groupe proposera en 1995 sur son live Pulse, à deux différences notables. D’une part, sur cette tournée, Dark Side of the Moon est joué live, mais pas forcément dans son intégralité selon les soirs. D’autre part, l’enregistrement de 1974 permettra de retrouver le Pink Floyd quasi originel (car point de Syd Barrett), avec Roger Waters dans ses rangs. Ce Live at Wembley Empire Pool sera, lui aussi, disponible le 24 mars prochain, pour un prix autrement plus abordable. Il est fort possible que nous en reparlions bientôt pour décortiquer l’intérêt et la qualité de l’objet.

Pour le moment, il est grand temps de laisser place à la musique. Time et, en bonus, The Great Gig in the Sky qui lui fait suite directement sur l’album.

Raf Against The Machine

Five Titles n°30 : Radiohead

Capture d’écran 2023-02-15 à 16.20.35Un Five Titles pour le moins original cette semaine : alors que nous réservons généralement cette rubrique à l’extraction de cinq titres d’un même album pour vous donner envie d’en écouter le reste, nous allons plutôt partir sur un top 5. Étrange idée ? Pas tout à fait. Voici quelques semaines, j’ai vu passer et répondu sur Twitter à un petit jeu consistant à donner son top 5 des titres de Radiohead, tout album confondu (Twitter où, je le rappelle, vous pouvez nous suivre dans nos pérégrinations bloguesques et culturelles en rejoignant nos deux comptes @sylphe45 et @BatRafATM). Ce top 5 Radiohead fut une sacrée difficulté : comment extraire de la discographie du groupe seulement cinq titres au beau milieu de cette avalanche de pépites depuis le premier album Pablo Honey en 1993 ? Trente ans que la bande de Thom Yorke nous accompagne, avec à ce jour une carrière parfaite. Pas un mauvais album, pas un titre à jeter. Après les plutôt rock Pablo Honey et The Bends (1995) que j’aime beaucoup, OK Computer (1997) fut la claque absolue dont je ne suis toujours pas remis. En 2000 et 2001, le diptyque Kid A / Amnesiac (aujourd’hui réuni dans le triple vinyle Kid A Mnesia sorti en 2021) fait entrer le groupe dans une nouvelle dimension artistique, en venant prolonger OK Computer tout en éclatant tous les repères.

Les quatre albums suivants, respectivement Hail to the thief (2003), In Rainbows (2007), The King of limbs (2011) et A Moon Shaped Pool (2016), installent définitivement Radiohead au panthéon du rock et de la musique des 20 et 21e siècles. Dès lors, comment ne retenir que cinq titres ? Tout simplement en les laissant venir, spontanément. Quels sont les morceaux qui me viennent et qui vibrent le plus en moi lorsqu’on me parle de Radiohead ? Réponse immédiatement, ici-bas, ici même.

  1. Paranoid Android (sur OK Computer) : titre rock, étiré, déconstruit, hors de toute norme single et radiophonique, Paranoid Android est un bijou de création qui alterne moments intimistes, dépressifs, planants, et explosions rock. Tout Radiohead est là, et si un jour il ne fallait en garder qu’un, le voilà.
  2. Like Spinning Plates (sur Amnesiac) : je peine à trouver les mots justes pour décrire l’effet que me fait cette chanson. Notamment dans sa version ‘Why us ?’, entendue sur le live I might be wrong en 2001, et disponible sur Kid A Mnesia. A écouter, tout simplement. Une des merveilles musicales de notre temps.
  3. Fake Plastic Trees (sur The Bends) : balade rock quasi acoustique qui empile les émotions comme les couches musicales, portée par la voix déchirée et déchirante de Thom Yorke. Là encore, une musicalité presque hors du temps.
  4. Motion Picture Soundtrack (sur Kid A) : quasi titre de clôture du chef-d’œuvre Kid A, un titre sans aucune guitare ni aucun attribut rock pour une mélodie aérienne qui monte très très haut à la faveur de chœurs quasi mystiques. En découvrant Kid A pour la première fois, et en le refermant avec ce morceau, des vagues d’émotions encore intactes aujourd’hui.
  5. Climbing up the walls (sur OK computer) : pour son travail sur le son, les dizaines d’artefacts et de glitches sonores (écoutez moi ça au casque je vous en prie), ce titre est une pépite d’écriture. Trois minutes contenues et posées en tension, pour finir sur un mur de guitares et de cordes déchirant, avant de s’échouer dans trente secondes de retombées. La transition avec No Surprises sur ce même OK Computer.

Vous aurez donc aujourd’hui non pas cinq minutes mais cinq titres de bon son fournis par une des plus grands groupes que la musique nous ait offert. On ne fait que relayer et vous partager ça, en attendant la review de fin de semaine qui concernera un autre grand musicien dont le dernier et bouleversant album est sorti vendredi dernier (spoiler/indice : on peut émouvoir avec des platines).

(Visuel by Stanley Donwood pour Radiohead)

Raf Against The Machine

Pépite intemporelle n°120 : Over my head (2015) de Asaf Avidan

81Wh3CgrybL._SY355_Petite virée dans des terres musicales hautement émotionnelles aujourd’hui, avec Asaf Avidan. D’abord connu comme le leader du groupe de folk-rock Asaf Avidan and the Mojos, le garçon s’est fait connaître en 2008 avec The Reckoning, le premier et très chouette album du groupe. La galette contient notamment le méga connu Reckoning song (One day), ensuite remixé de diverses façons plus ou moins heureuses. Dès ces premières compositions, c’est tout à la fois la richesse musicale et la voix hors normes d’Asaf Avidan qui nous saisissent. Un talent à fleur de peau qui ne fera que se confirmer, et particulièrement dans Different Pulses (2013), son premier album solo. C’est pourtant sur le deuxième que l’on va s’arrêter quelques minutes, le temps d’une pépite intemporelle. Gold Shadow (2015) est, lui aussi, une merveille de 13 titres qui ne laissent personne indemne.

A commencer par Over my head, splendide ballade qui sonne un peu comme du Bob Dylan qui aurait enregistré Blonde on Blonde dix ans plus tôt dans les années 1950. Il en résulte deux minutes trente de pure merveille musicale. Tout comme Maybe you are irradiait l’ouverture de The Reckoning, Over my head annonce le grand album qui s’offre à nous. Rien que les quatre premiers titres sont une immense fessée musicale, introduite par ce Over my head qui m’a obsédé des jours durant à la sortie de l’album. Pour son rythme doux et lancinant, pour la tendre plainte vocale d’Asaf Avidan, pour la puissance du voyage en moins de trois minutes. Comment un seul garçon peut-il contenir autant de talent, autant d’émotions, et savoir si bien les exprimer ? Je n’en sais foutrement rien. Seul compte le plaisir que j’ai à chaque écoute de Gold Shadow, à commencer par Over my head. Pour vous avoir fait saliver, vous aurez un deuxième titre en écoute. Et pour prolonger le tout, écoutez Gold Shadow en entier, avant de plonger dans The study on falling (2017), troisième album d’Asaf Avidan, et autre merveille à explorer.

En bref, écoutez Asaf Avidan. En commençant par ça.

Raf Against The Machine

Pépite intemporelle n°119 : Pure Morning (1998) de Placebo

71TjTnlLKcL._SL1400_Connaissez-vous l’histoire du garçon qui procrastine toute la semaine, en se disant qu’il a le temps d’écrire sa chronique ? Ne cherchez pas, le monsieur en question est face à vous (enfin, derrière le clavier), et c’est dans une certaine urgence teintée néanmoins d’un grand plaisir que je vous drope un son en ce vendredi soir. Pour faire un pied de nez à la soirée, quoi de plus amusant que d’écouter un titre matinal ? En l’occurrence, celui qui me trotte dans la tête depuis ce matin. Voilà plusieurs jours que je cherche quoi chroniquer, et la vie m’apporte une pépite intemporelle avec Pure Morning de Placebo. Titre d’ouverture de Without you I’m nothing (1998), deuxième album de Placebo, Pure Morning envoie du gros son d’entrée de jeu. Guitares saturées lourdes et sèches surplombées par la voix hors norme de Brian Molko, voilà 4 minutes de son comme on l’aime chez Five-Minutes. Si affinités, je vous invite fortement à écouter le reste de l’album, qui est pour moi le meilleur de toute la discographie du groupe. Treize titres et autant de pépites écoutées et usées jusqu’à l’os il y a 25 ans, et depuis très régulièrement. Without you I’m nothing est une de ces galettes dont je ne me suis jamais vraiment remis. En raison de ce Pure Morning, mais aussi du furieux et tendu Every you every me, que je vous mets en écoute bonus pour me faire pardonner de la livraison tardive de cette chronique. Bon weekend et bon Pure Morning.

Raf Against The Machine

Pépite du moment n°126: Strung Out Johnny d’Iggy Pop (2023)

Voilà plusieurs semaines que le dernier album Every Loser d’Iggy Pop tourne en boucle chez moi et que je tente de mIggy Pop - Every Losere convaincre difficilement que l’iguane a bien 75 ans… J’ai déjà eu la chance de voir Iggy en festival au Printemps de Bourges dans une autre vie, la vie où il était torse nu et manquait à tout moment de dégainer la banane car le monsieur a une forte tendance à l’exhibitionnisme. Sa carrière avec les Stooges ou en solo est gargantuesque et je me suis littéralement perdu dans sa discographie au point d’abandonner le compte de ses albums… J’ai longtemps hésité à écrire une review sur Every Loser, puis je me suis ravisé, ne me sentant pas les épaules pour le chroniquer, par respect pour les fans de la première heure qui auraient perçu ma relative méconnaissance de la discographie de l’icône rock qu’il est.

L’homme sait s’entourer et l’on retrouve Chad Smith des Red Hot Chili Peppers, Duff McKagan des Guns N’Roses, Stone Gossard de Pearl Jam et Taylor Hawkins des Foo Fighters entre autres… Désolé pour le name-dropping mais il est bon de montrer que participer à un album d’Iggy Pop reste un graal ultime pour tout musicien rock qui se respecte. Le résultat est un condensé d’énergie rock de 11 titres et 36 minutes qui me laisse pantois, les années semblent n’avoir pas de prise sur l’iguane et cette voix tout droit sortie d’outre-tombe fait toujours le même effet… J’ai choisi le tube en puissance Strung Out Johnny qui aborde l’addiction à la drogue (oui très surprenant), les guitares sont de sortie et le chant monte en puissance, prenant presque une teinte plus pop. Le clip est barré, Iggy Pop a priori doit sa ligne à une consommation accrue de fruits, bref tout est en place, enjoy !

 

Sylphe

Pépite intemporelle n°115 : Whole lotta love (1969) de Led Zeppelin

Vinyles-Led-Zeppelin-Vinyle-Led-Zeppelin---Led-Zeppelin-II--Remastered--lAprès 2022, ses 12 mois et tous ses bons sons partagés ici, il est grand temps de basculer en 2023 (comment ça on est déjà le 13 janvier ?). En commençant par souhaiter à tous nos lecteurs une excellente nouvelle année, pleine de bonnes choses, de santé et d’amour. Et puisqu’on parle d’amour, pourquoi ne pas fêter cette première chronique de 2023 avec un titre plein de love ? Avec élégance et distinction, comme toujours sur Five-Minutes. Whole lotta love (littéralement « Tout plein d’amour ») est sans doute ce qu’on fait de plus éloigné de toutes les bluettes et déclarations d’amour guimauves. On est là face à presque 5 minutes de pure énergie en tout genre, incandescentes et fortement sexualisées. La chanson ouvre Led Zeppelin II, deuxième album du groupe Led Zeppelin emmené par Robert Plant (chant) et Jimmy Page (guitare). Un album qui contient d’autres pépites comme The lemon song, Heartbreaker ou encore Moby Dick et son incroyable solo de batterie par John Bonham. Pourtant, c’est bien Whole lotta love qui met une baffe monumentale en ouvrant la galette et semble irriguer de toute son insolence le reste de l’album.

Whole lotta love est une adaptation de You need love du bluesman Willie Dixon, titre auquel Robert Plant ajoute quelques passages. Mis à part son titre somme toute assez sage (qui ne voudrait pas « Tout plein d’amour » ?), c’est plutôt ce qu’on trouve en fouillant un peu qui érotise l’ensemble. L’original de Willie Dixon contient déjà des paroles sans équivoque avec le « way down inside » (« tout au fond de toi »). Led Zeppelin va un peu plus loin en ajoutant au beau milieu du titre des cris vocaux d’orgasme se mêlant à d’autres moins évidents (mais tout aussi explicites) joués au thérémine par Jimmy Page pendant la montée psychédélique, sonore et jouissive du pont de milieu de la chanson. Comme s’il en fallait encore, les dernières paroles sont tout aussi électriques et font référence au Back Door Man (autre titre blues de Willie Dixon, repris cette fois par les Doors en 1967 pour une version tout aussi sexuelle que Whole lotta love) : « Shake for me girl, I wanna be your back door man » (Secoue-toi pour moi, je veux être ton homme de la porte de derrière). Tout un programme.

L’ensemble deviendra rapidement un standard absolu du groupe, autant pour son énergie et ses qualités musicales rock que pour le parfum vénéneux que le morceau dégage. Joué durant des années dans à peu près toutes les prestations du groupe, parfois dans d’interminables versions longues comme un orgasme qu’on retarde pour mieux le laisser venir, Whole lotta love est un titre chaud comme la braise, dévastateur, profondément connoté. Le genre de morceaux entré dans les annales depuis des années et jusqu’à la nuit des temps. Tant que les hommes et les femmes aimeront le rock, l’amour et le sexe, ils écouteront Whole lotta love.

Cerise sur le gâteau ? Whole lotta love est sorti en 1969, année érotique. Quant à la pochette du disque, regardez bien. On en le voit pas au premier coup d’œil mais il y a bien un gros Zeppelin gonflé qui flotte sur l’album. Il vous faut encore des explications après ça ? Si non, passons à l’écoute et à la démonstration, son à l’appui. Si oui.. et bien passons à la dernière preuve que seront l’écoute et la démonstration, son à l’appui. Whole lotta love !

Raf Against The Machine

Pépite du moment n°122: Long Live The Strange de Gaz Coombes (2022)

Non nous n’avons pas fait une croix sur la musique aujourd’hui après le match légendaire vécu hier et sa cruelle issue…Gaz Coombes Turn The Car Around Le sport et la musique ont comme dénominateur commun la capacité à faire ressentir des émotions d’une rare intensité, n’en déplaise aux pisse-froid qui dénoncent l’absence de valeurs dans le sport et les dérives de l’argent dans une volonté de simplifier les faits à l’excès… J’ai donc besoin d’un bon son à partager et j’ai ce qu’il me faut avec ce Long Live Strange de Gaz Coombes, ancien leader vocal du groupe Supergrass. Son quatrième opus Turn The Car Around dont est tirée la pépite du jour sortira le 23 janvier et j’ai du retard à rattraper car je ne me suis jamais trop penché sur cette carrière solo.

Rythmique obsédante en fond qui rappelle Cage The Elephant, ruptures de rythme subtiles, voix feutrée, le titre aborde avec un regard un brin amusé l’étrangeté du monde qui nous entoure. Un morceau addictif que je ne cesse d’écouter en boucles depuis deux semaines, à savourer sans aucune modération, enjoy ! A noter un clip surprenant qui n’a pas dû coûter trop cher en figurants !

 

Sylphe

Pépite intemporelle n°112 : Year of tha Boomerang (1996) de Rage Against The Machine

519PtbRH2fLNous voici à moins d’un mois de quitter 2022. Certes, l’année n’est pas encore terminée, mais comme un bon marronnier on se prépare à faire la rétrospective de ces 12 derniers mois. Ici, vous trouverez bientôt nos classiques Tops, qui récapituleront ce qui nous a musicalement marqué. Ailleurs, ce seront les évènements marquants de ce monde. Tout ce qui a pu nous saisir à un moment ou un autre. Elle est pas belle cette année 2022 ? Chaque mois de décembre depuis quelques années, on se dit peu fâchés de quitter l’année pour embrasser la suivante sous le gui. Et puis ? Un festival. On n’est jamais déçus des 12 mois qui suivent les 12 précédents. Me concernant, je crois que ça dure surtout depuis 2015. Oui, 7 ans déjà que l’année suivante est toujours plus régalante que la suivante. Notre 2022 qui court vers sa fin n’échappe pas à la règle. Pourtant, elle plus encore que les autres m’a fait remettre sur la platine Year of tha Boomerang de Rage Against The Machine. Vous vous demandez pourquoi ? Réfléchissons quelques lignes ensemble.

On a tous été saisis dès février avec l’attaque de la Russie sur l’Ukraine, et le conflit qui perdure désormais. Pas une semaine ne passe depuis sans qu’on se demande si la planète ne va pas s’auto-vitrifier. A peine deux mois plus tard, la France s’offre une élection présidentielle ahurissante où l’on voit monter un peu plus l’extrême-droite. Sans se douter que, quelques semaines plus tard, elle fera son entrée massive et tonitruante à l’Assemblée Nationale. On n’est pas bien là ? Non, on n’est pas bien. Heureusement, nous avons passé un été frais et serein. Oups, non. Coups de chaud à répétition, feux de forêt cauchemardesques en France, mais aussi en Europe et en Afrique du Nord. On se remettra à l’automne avec une Coupe du Monde de Football apaisée et éthique. Oups, non plus. Si ces quelques grands évènements ne sont pas un retour de boomerang d’ambiguïtés géopolitiques, de manque de courage politique, de complaisance envers les idées les plus nauséabondes que l’Homme peut véhiculer, d’alertes environnementales niées depuis des décennies, de prééminence du pognon sur l’humain, je ne vois pas ce que ça peut -être d’autre.

Heureusement, le boomerang apporte parfois aussi quelques notes de positif et d’espoir. Un Brésil qui éjecte son président extrémiste, une population iranienne qui dit non, des salopards de mecs qui tombent les uns après les autres pour avoir fait les pires saloperies à des femmes, une rédaction jeux vidéo qui se saborde avec dignité suite à son rachat et recueille tous les honneurs de son lectorat (oui Gamekult 2002-2022, respect à toi)… Parfois le boomerang ramène de la merde, parfois il nous réserve de belles surprises et quelques notes de lumière.

Lumière comme dans ce titre de clôture de Evil Empire, deuxième album de Rage Against The Machine. Pas ma galette préférée du quatuor, mais un opus qui contient tout de même des brûlots absolus tels que Bulls on parade ou Without a face. Et Year of tha Boomerang qui nous claque en pleine tronche ses 4 minutes, pour nous laisser sonnés mais heureux de tant d’énergie, de conviction et d’intransigeance. On se retrouve en 2023 pour lancer une nouvelle fois le boomerang ? Pas tout à fait. On a encore l’année musicale à récapituler. C’est pour bientôt. En attendant, si vous avez un peu la rage, mettez beaucoup Year of the Boomerang dans vos oreilles.

Raf Against The Machine

Pépite intemporelle n°108 : Untitled #1 (Vaka) (2002) de Sigur Rós

R-69857-1505864447-6375Une chronique Five-Minutes peut tenir à peu de choses. Parfois longuement mûrie et réfléchie, parfois plus spontanée, elle a toujours pour objectif de partager un moment et un bon son. Celle d’aujourd’hui n’échappe pas à la règle et, si elle aurait pu relever de la catégorie « mûrement pensée », elle s’inscrit toutefois dans la seconde. Notre son du jour est d’un intemporalité évidente, mais il m’est revenu dans les oreilles de façon un peu inattendue alors que j’échangeais quelques messages avec un copain sur la beauté de ce monde (non). Spoiler : nous étions en train de discuter de toutes les tristes immondices qui nous entourent, entre la nature dont tout le monde semble se contrefoutre et préférer la saloper, le racisme ouvertement exprimé dans l’enceinte de l’Assemblée Nationale, ou encore la connerie humaine en général. Vaste programme dépressif à nous rendre plus asociaux et misanthropes qu’on ne l’est déjà. Nous avons cherché une lueur d’espoir, que j’ai modestement résumé par un « Heureusement qu’il y a la musique ». Ce à quoi le garçon m’a répondu par l’envoi d’un lien simplement ponctué d’un « Genre ça ».

Le lien en question, c’était cette pépite totale du jour. Untitled #1 est le titre d’ouverture du troisième album de Sigur Rós nommé (). Pas vraiment de titre pour cet opus qui fait suite au déjà excellent Ágætis byrjun (1999), en relevant encore le niveau. Si le groupe islandais s’était déjà montré on ne peut plus créatif, cette troisième galette enfonce le clou de la poésie sonore et de l’évasion maximale. Sur de grandes nappes sonores quasi hors du temps, le chanteur Jónsi pose sa voix de falsetto pour des mélodies qui défient les lois du temps et de l’espace. Sans doute un des plus beaux albums au monde, () est une claque absolue autant qu’une bulle pour se réfugier du monde et arriver à le supporter.

Le titre d’ouverture Untitled #1 illustre brillamment ce constat, en se faisant mélange de douceur et de mystère porté par les mots de Jónsi. Mots que l’on ne cherchera pas à comprendre, puisque l’album tout entier est enregistré en Vonlenska, une langue inventée en totalité par le chanteur. Est-ce essentiel de comprendre le texte ? Non, pas quand la voix et les sons qui l’entourent portent autant d’émotions. Le morceau se suffit à lui-même, et sans plus tarder nous allons en profiter dans une version live quelque peu différente de l’enregistrement originel, mais tout aussi envoûtante. Puisque le bonheur des oreilles est total, on vous drope les deux version, histoire de comparer et de doubler le plaisir.

Et, si l’ambiance vous attrape autant que nous chez Five-Minutes (Sigur Rós figure vraiment très haut dans notre panthéon musical), courez donc écouter la totalité de (). Un album qui ressort d’ailleurs pour ses 20 ans, en version remasterisée et augmentée de 3 B-sides et 3 démos. Ne vous privez pas de cet album hors du temps qui nous permet de continuer à vivre dans ce temps.

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