Nous aurions pu, en ce jeudi, nous faire un petit Five titles qui va bien, pour parcourir un album qui va bien aussi. Toutefois, la semaine ayant été ce qu’elle a été, cette virée en cinq titres sera pour plus tard. Le mood du moment m’amène plutôt à réécouter du son qui déboîte, à l’image de notre pépite intemporelle du jour. Nous sommes en 2020 (peu de chance qu’on l’oublie, et qu’on oublie cette année semblable à une gigantesque bouse), mais nous sommes aussi en 1999 tant Calm like a bomb est un titre intemporelle. Et donc pépite, puisque sorti de la tête et de l’énergie de Rage Against The Machine, autour d’un Zach de la Rocha super vénère.
Calm like a bomb, c’est le troisième titre du troisième album du groupe. The Battle of Los Angeles fait suite à Evil Empire (1996), qui contenait certes de pures pépites là aussi (je pense à Bulls on parade, Vietnow ou encore Year of the boomerang), mais qui reste, à mon goût, en deçà de l’incendiaire et parfait premier album Rage Against The Machine (1992). En 1999 débarque donc la troisième galette des rageux, qui renoue avec une cohérence et une puissance imparable. Pensez donc : alors que sonnent les premières notes de Calm like a bomb, on a traversé seulement deux titres sur douze, et on s’est déjà pris en pleine face Testify et Guerilla Radio.
Calm like a bomb porte bien son nom, et est construit comme tel. Démarrant sur une douce et ronde ligne de basse, tempo plutôt lent et murmures de Zach de la Rocha, on se dirait presque qu’on s’est fait avoir. Quoi ? Comment ça ? C’est ça le son 1999 de Rage Against The Machine ? Oui, c’est ça, et il faut laisser au titre le temps de se dérouler, pour en saisir toute l’énergie contenue. Jamais le tempo ne va s’accélérer, jamais non plus ça va partir dans tous les sens. En revanche, par un savant empilement de la rythmique de plus en plus lourde, d’une guitare de folie sous les doigts de Tom Morello et du flow furieux de Zach de la Rocha, on part direct sur cinq minutes incandescentes que rien n’éteindra. Et surtout pas le refrain, qui défonce vraiment tout. La bombe n’explosera jamais, mais on sent que tout est à fleur de peau et qu’il suffirait d’un rien. Au bord de la crise de nerfs.
Un titre donc moins calme qu’il n’y paraît, et finalement encore bien plus explosif qu’il ne l’est déjà par son climax démentiel. Calm like a bomb est un titre énorme. Il vend de l’espoir là où il n’y en a plus. Il donne l’énergie de tout foutre en l’air pour tout changer. Mais tout foutre en l’air avec intelligence car, rappelons-le, le groupe est bien loin d’être un quatuor de cons. Militants, engagés, avec une vraie réflexion sur le monde dans lequel on survit. Ces quatre là ont changé tout autant mes jeunes années que la face d’un rock qui s’avérait à la fois nerveux, de très haute tenue, puissant et intelligent. Ce n’est sans doute pas un hasard si ce même Calm like a bomb clôt la fin inattendue de Matrix Reloaded et son cliffhanger total barge. Dans le travail des Wachowski et dans l’univers de Matrix, on n’est finalement pas loin de la dinguerie du monde actuel qui m’a fait ressortir mon Calm like a bomb.
Faites ce que vous voulez. Pour ma part, je retourne à mon auto-confinement histoire d’échapper au COVID mais aussi à l’auto-connerie ambiante d’un monde qui, manifestement, a décidé de s’auto-détruire avant même d’atteindre le full high-level Idiocracy (grand film visionnaire). Quoique. Peut-être est on déjà dans la Matrice, et peut-être que le monde réel est déjà à un stade avancé d’Idiocracy. Dans un cas comme dans l’autre, Calm like a bomb s’impose comme le son du moment. A écouter en boucle. Et (très) fort.
Raf Against The Machine