Incontestablement ce Grand Prix aura été mon album de l’été et une occasion en or pour réécouter la discographie de Benjamin Biolay – ce qui n’est pas une mince affaire car le garçon est plutôt prolixe -pour une playlist que je partagerai bientôt. Il ne sert à rien de vous faire patienter inutilement, ce neuvième album solo s’impose comme un des meilleurs albums de Biolay qui pourra humblement prendre sa place à côté de La Superbe, A l’origine ou encore Vengeance. Je ne vous ferai pas l’injure de vous présenter Biolay qui, depuis Rose Kennedy en 2001, s’impose comme un parolier et un artiste majeur des années 2000. Cependant je reconnais volontiers avoir un attachement particulier pour le chanteur mais aussi l’homme, subtil mélange de fragilités et de fausses certitudes.
Ce Grand Prix est donc placé sous le signe de la F1, une passion de Biolay qui dans les interviews fait souvent allusion au traumatisme vécu par toute une génération avec la mort d’Ayrton Senna sur le circuit d’Imola en 1994. La pochette est séduisante et j’aime tout particulièrement la liste des titres sous la forme d’une grille de départ. Je vous propose de me suivre dans une course haletante en espérant éviter les accidents et l’intervention de la safety car.
Le morceau d’ouverture Comment est ta peine?, le premier single de l’album qui a inondé les ondes, permet de démarrer sur les chapeaux de roue. Ce morceau doux-amer évoque la mélancolie liée à la séparation – « J’aurais dû te libérer/ Avant que tu ne me libères moi » – sans tomber dans le pathos, le refrain est addictif à souhait et l’instrumentation brillante avec en particulier les cordes qui m’avaient déjà tant touché sur La Superbe. Ce morceau mérite amplement son statut de single et lance parfaitement la course. Visage pâle en featuring avec la fidèle de toujours Chiara Mastroianni met ensuite en avant la puissance de l’amour à travers la fin d’une relation. Le morceau plus pop fonctionne bien avec ses synthés omniprésents avant un Idéogrammes beaucoup plus rock. Les guitares sont de sortie, le chant plus acéré pour un beau testament virtuel qui met en avant l’hédonisme et le refus de l’engagement amoureux. Le refrain devenu plus soyeux avec les cordes est tout simplement imparable…
Comme une voiture volée s’impose ensuite comme un énorme coup de coeur. Refrain addictif, atmosphère plus pop, il aborde le coup de foudre et subtilement le vieillissement, » Si je t’avais rencontrée avant/ Quand j’étais jeune et charmant ». Biolay assume parfaitement sa capacité à créer des morceaux pop plus frontaux et ce n’est pas pour me déplaire. Vendredi 12 contraste alors avec la lenteur de son rythme et sa mélancolie accentuée par les cordes, la sensation d’abandon est finement croisée avec les bons souvenirs mais Biolay est bien seul, « J’ai bu la tasse dans la mer Noire ». Le ciel s’éclaircit alors avec les sonorités plus ensoleillées de Grand prix où le refrain plus lumineux contraste avec des couplets plus sombres afin d’aborder le parallèle entre la vie et la course automobile. Un morceau évident, tout comme Papillon noir en featuring avec Anaïs Demoustier, morceau plus dark qui n’est pas sans me rappeler les atmosphères d’Arman Méliès.
Ma route vient ensuite jouer la carte d’une pop-folk apaisée où Biolay fait le bilan d’une vie où il a pleinement vécu et tracé sa route avec un appétit débordant. Passée la pépite électro Safety car, intermède de luxe quasi instrumental , Où est passée la tendresse? aborde de nouveau la question du vieillissement sans pathos avec une atmosphère rock convaincante et un refrain extrêmement juste. La sagesse mélancolique de La roue tourne et la justesse de son texte « En ignorant les codes/ On est baisé d’avance/ Mais en les suivant trop/ On n’a aucune chance », la luminosité de Souviens-toi l’été dernier en featuring avec Keren Ann ou encore la saudade Interlagos avec Bambi qui clot en douceur l’album et rappelle de nouveau Ayrton Senna (à qui cet album est dédié) ne font que confirmer que cet album ne connaît aucun point faible. Je ne peux que vous conseiller d’enfiler votre combinaison et votre casque, cette course loin d’être effrénée vous laissera savourer dans le rétroviseur les doux instants passés, enjoy!
Sylphe
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